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  • Another Little Culture Shock

    jeudi 16 octobre 2014
    Louis Roy O.P.

     

    Blackfriars

    In a previous blog, I described a little culture shock among academics. This time, the other little culture shock I will introduce involved ordinary people. It took place, in Cambridge, at the Dominican priory, whose name is ‘Blackfriars.’ This is how the British Dominicans are named, after the black cappa they wear in winter. We in Canada display it on special occasions, such as at Commencement.

                One summer, for a few weeks we had as a guest at Blackfriars an adolescent, aged sixteen, the daughter of a German doctor who was a close friend of our prior. Almost as soon as she settled among us, young Dorothea was taken aback by the eccentricities of the English. Being a teenager, she was slightly impatient with regard to their oddities, which she used to question in a tone that was – unwittingly of course – a bit self-righteous and reprimanding. She may have assumed that the Germans did things in a way that was more natural and efficient than the strange, awkward British.

                Her reaction was characteristically summed up by her question, ‘why?’. Given that her voice was still rather childish, her succession of ‘whys’ sounded like a small dog’s barking. In face of her perplexity at what she was observing in British mores, the latter, somewhat at a loss on how to explain and after unsuccessfully trying to do so, could only respond by saying: “It’s odd, you know, but it works!” This is what they would exclaim, almost in desperation, whenever foreigners would insinuate they could not make sense of the weird habits of proud Albion’s inhabitants.

                The bottom line was: “it works!” And having repeatedly heard this assertion, it dawned on me that it was typical of a staunchly empirical and pragmatic culture, which endlessly produced practical fruits, owing to its roots deeply set in a very long experience. It was indeed the common sense of a nation of great mariners, explorers, traders, politicians, scientists, writers and artists. They had run a vast empire, which lasted three centuries precisely because “it worked!” The remarkable thing – probably a mixed blessing – is that those insulars have now managed to export their pragmatism worldwide. It has by and large dislodged and replaced the idealistic view of life held by the Germans, the French and the Spaniards.

     

  • Quelle sagesse recherchons-nous ?

    vendredi 12 septembre 2014
    Louis Roy O.P.

     

    Dans sa Première Épître aux Corinthiens, saint Paul déclare : « Le langage de la croix est folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui sont en train d’être sauvés, pour nous, il est puissance de Dieu. Car il est écrit : Je détruirai la sagesse des sages et j’anéantirai l’intelligence des intelligents (Is 29,14). Où est le sage ? Où est le docteur de la loi ? Où est le raisonneur de ce siècle ? Dieu n’a-t-il pas rendu folle la sagesse du monde ? En effet, puisque le monde, par le moyen de la sagesse, n’a pas reconnu Dieu dans la sagesse de Dieu, c’est par la folie de la prédication que Dieu a jugé bon de sauver ceux qui croient. »

    Selon ce texte, il semble bien que la sagesse du monde soit un leurre et que, par conséquent, il y ait une antinomie totale et irréductible entre sagesse chrétienne et pseudo-sagesse, notamment celle qui s’exprime en philosophie. On ne trouve guère dans le Nouveau Testament l’idée qu’il serait avantageux de se mettre à l’école des Grecs. Après tout, Jésus ne s’est-il pas exclamé : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela [les mystères du Royaume] aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits » (Mt 10,25 et Lc 10,21) ? En outre, l’approche de saint Paul (en Actes 17,16-32), inspirée par le stoïcisme et le platonisme, ne fut-elle pas un échec presque complet ?

    C’est dire que, en ce qui concerne ce sujet si central, à la suite de la majorité des Pères de l’Église et de son maître saint Albert le Grand, saint Thomas d’Aquin aurait été infidèle à la révélation divine, transmise par saint Paul ! D’ailleurs c’est exactement ce que pensaient de grands croyants tels que Luther, Calvin, Kierkegaard et Karl Barth, d’après lesquels il est absolument impossible de combiner sagesse chrétienne et pseudo-sagesse philosophique. Faudrait-il donc choisir ?

    Saint Thomas, qui écrivit des commentaires sur toutes les lettres de saint Paul, connaissait évidemment fort bien la pensée de celui qu’il appelait « l’apôtre ». Saint Thomas affirme que la sagesse divine révélée en Jésus Christ dépasse les capacités de l’intelligence humaine (Commentaire sur la Première épître aux Corinthiens, chap. 2, leçon 1, no 86). Il déclare que « il est vain de chercher la véritable sagesse ailleurs que dans le Christ » et que « toute science réside dans le Christ » (Commentaire sur l’Épître aux Colossiens, chap. 2, leçon 1, nos 82 et 84). Il rappelle que « la foi chrétienne […] se glorifie tout spécialement dans la croix de notre Seigneur Jésus Christ » (De rationibus fidei, chap. 1, no 949).

    Cette position du docteur angélique est-elle compatible avec son grand désir d’apprendre des choses importantes en lisant Aristote, celui qu’il appelle « le philosophe » ? On trouve une réponse implicite dans ce qu’il dit de la croix : « Là [dans la croix] un signe évident de l’amitié divine se montre. […] Car rien ne manifeste mieux la miséricorde de Dieu pour nous que la mort du Christ » (Commentaire sur l’Épître aux Galates, chap. 6, leçon 4, no 371).

    Ce qu’il importe de remarquer, c’est que pour saint Thomas la croix a un sens, celui de manifester la miséricorde de Dieu. Si la croix est, comme l’écrit saint Paul, « folie pour ceux qui se perdent », elle est, par contre, toujours selon saint Paul, « sagesse de Dieu », reconnue comme telle par les personnes qui s’efforcent d’en découvrir le sens. Ainsi donc, saint Thomas extrapole en s’engageant dans une quête de sens qui examine toute forme de sagesse. En effet, l’unité du sens voulue par le Créateur – et appréhendé par tous les esprits angéliques et humains – justifie une entière ouverture à toutes les facettes de la vérité. 

    L’engagement intellectuel de Thomas se fait toutefois à partir d’un horizon de foi, grâce auquel l’intelligence humaine accepte de se laisser purifier par la parole de Dieu. Pour lui, la sagesse révélée est assez solide pour se permettre d’accepter la sagesse naturelle de façon critique. C’est comme si notre cher frère Thomas nous disait : « Grâce à ma foi en Dieu, je cherche avec confiance la sagesse répandue par le Créateur dans tout l’univers, y compris dans les réflexions des non-chrétiens. »