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  • Aujourd'hui, ne fermez pas votre coeur, écoutez...

    mardi 17 février 2015
    Maxime Allard O.P.

     

    Aujourd'hui, ne fermez pas votre coeur...

    « Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, écoutez… » La phrase retentira bien des fois au début du Carême, dans l’Église catholique.

    Étrange phrase…. Est-ce que « Aujourd’hui, écoutez » n’aurait pas suffi? Et, est-ce qu’il ne faut pas déjà être à l’écoute pour entendre cette invitation? Est-ce qu’il ne faut pas déjà que des oreilles ouvertes – voire déjà un cœur au moins entrebâillé – soient à l’œuvre pour que le son de la voix ne soit pas qu’une rumeur de fond? Certes. D’ailleurs, la phrase ne dit pas qu’il faille ouvrir un cœur qui serait fermer mais bien, elle est incitation à le conserver ouvert, à choisir de ne pas le fermer, à résister aux tentations de le replier sur lui-même.

    Étrange phrase… Comme si pour écouter, il avait d’abord fallu garder un cœur ouvert!?

    À bien écouter et laisser la phrase résonner, à force de la ruminer, on en perçoit toute la vérité. Ne dit-on pas, avec raison, qu’il « n’y a pas pire sourd que qui ne veut pas entendre », que qui choisit de ne pas porter attention à un message, à une voix, à une messagère? Combien de fois, une parole qui aurait pu être utile est-elle restée son inutile parce que la personne à qui elle était adressée n’avait pas envie de vous entendre? De vous entendre lui lire cela? Un professeur sait cela; un administrateur aussi. Mais une étudiante et une ouvrière aussi! Pour ne rien dire de ce qui arrive dans un couple, un groupe, une société!

    Et si « aujourd’hui », en ce jour-ci, peut-être seulement pour ce jour-ci, pour cet aujourd’hui, consciemment, les cœurs n’étaient pas fermés, ne se refermaient pas avant même qu’une parole ait été adressée… Si en ce jour-ci, dans les divers régimes de nos interactions quotidiennes, nous tentions l’expérience de ne pas fermer nos cœurs et que nous nous écoutions! Si… peut-être alors la face de la terre en serait-elle changée (un peu) ! Puis, qui sait, nous y prendrions peut-être goût…

    Étrange invitation. Si elle était répétée – tant l’invitation que l’expérience qu’elle suggère –  pendant une quarantaine de jours, soit jusqu’aux environs de la fin du semestre, jusqu’à la fin de l’octave de Pâques, la face de l’Université serait peut-être déridée. La vie et la vérité y circuleraient certainement mieux!

    Dominicain en contemplation

  • Thomas d'Aquin: un homme qui inspire

    vendredi 23 janvier 2015
    Maxime Allard O.P.

     

     

    Il existe bien des statues, des images de Thomas d’Aquin. Certaines sont des chefs-d’œuvre, d’autres sont tout simplement « quétaines »! Parfois il a l’air d’un gros poupon fardé, dégoulinant de piété sucrée; parfois on lui a donné l’air d’un Jupiter dictant la vérité! Cela en dit plus long sur les auteurs de ces images ou statuts que sur Thomas d’Aquin lui-même. Et chaque année semble en apporter de nouvelles versions.

    Il existe bien des interprétations des textes de Thomas d’Aquin! Les écoles dites « thomistes » se multiplient au fil des siècles. Diverses perspectives guident les relectures du corpus : littéraires, historiennes, analytiques, spirituelles, augustiniennes, néo-platoniciennes, après avoir été aristotéliciennes et systémiques. On propose des condensés, des résumés, des succédanés… Il est servi à la sauce apologétique; il sert d’épouvantail représentant tout ce qu’il y a de pire dans l’onto-théologique ou bien, encore, on le présente comme la panacée universelle.

    Rarement, prend-t-on le temps de le lire pour le plaisir de se laisser guider dans une quête paisible de propos réfléchis, dans les entrelacs de propositions difficilement conciliables à première vue, dans l’exploration des richesses de la tradition philosophique occidentale qui était alors disponible. Rarement, accepte-t-on de le suivre inventant un genre littéraire, défrichant des questions qui n’étaient pas encore devenues « habituelles », scolaires. Et, pourtant, quels moments intellectuellement stimulants on peut alors vivre lorsqu’on accepte de quitter le monument catholique, les diktats dogmatiques et les resucées sclérosantes!

    Au Collège Universitaire Dominicain, à chaque année un séminaire aux études supérieures porte sur les textes de Thomas d’Aquin. Dans plusieurs cours, des références y sont faites. Le CUD est probablement l’institution universitaire canadienne où le nom « Thomas d’Aquin » résonne le plus souvent dans les classes, où ses textes sont lus, interprétés avec un esprit critique. Avec le même esprit critique qui animait Thomas d’Aquin dans sa lecture d’Avicenne, d’Averroès, d’Aristote, de Boèce, de la Bible, d’Augustin…

    Au Collège Universitaire Dominicain, nous optons pour initier les étudiants et les étudiantes à la lecture de ces textes « étranges », aussi étrange que ceux de Platon, d’Aristote, de Heidegger ou de Wittgenstein! Leur capacité à discuter, à débattre ne peut qu’en bénéficier!

    Thomas d’Aquin, un dominicain du XIIIe siècle, fasciné par la Parole de Dieu et sa méditation, stimulé par la philosophie et ses questions, un chercheur intense… un saint… le saint patron du Collège Universitaire Dominicain. Continuons à honorer sa mémoire et à nous laisser stimuler à réfléchir, à méditer aujourd’hui, à partir des défis d’aujourd’hui, pour nos contemporains! Autrement, fermons boutique!